Quand les armes arrivent jusqu’aux mains des enseignants
En 2024, environ 83 fusillades ont eu lieu dans des écoles aux États-Unis d’après Gun Violence Archive. Face à un nouveau drame et à des chiffres en pleine expansion, l’armement des enseignants devient une question centrale.

Une craie dans une main, une arme à feu dans l’autre, tel est le nouveau portrait des enseignants aux Etats-Unis. Confronté à la multiplication des fusillades au sein des écoles, le port d’armes sur les enseignants dans leur établissement scolaire est devenu, pour certains, la solution face à ces drames incessants.
Le dernier en date, le lundi 16 décembre 2024 dans le Wisconsin. Une jeune fille, âgée de 15 ans seulement, est rentrée dans son établissement scolaire armé faisant trois morts et de nombreux blessés.
16 États
Parmi les cinquante États américains, seize d’entre eux ont autorisé les professeurs à porter des armes à feu au sein de leur établissement.
Tandis que certains d’entre eux s’arrêtent à la mise en place de vigiles ou policiers armés devant les écoles, d’autres optent pour le port d’armes directement sur les enseignants. C’est le cas de l’État de Floride ou encore celui d’Ohio. Chaque professeur doit suivre une formation allant de 24h pour l’état d’Ohio à 144h pour celui de Floride. Une disparité ne laissant pas sans questionnement. Face à des heures de formations parfois très courtes, tout enseignant n’est pas apte à manier des armes en sécurité augmentant ainsi le risque d’accident au sein des écoles.
Cette idée d’armer les instituteurs ne date pas d’hier. En 2018, Donald Trump avait déjà proposé le port d’armes aux professeurs, rouvrant les débats sur la sécurité des citoyens.
Des enseignants partagés
Actuellement, la majorité des enseignants (environ 80% d’après une enquête de National Education Association) ne souhaitent pas voir leur profession s’armer. Des syndicats tels que American Federation of Teachers (AFT), s’opposent fermement à cette idée. Ils prônent des outils de prévention ainsi que le développement des ressources pour la sécurité scolaire déjà mis en place.
Toutefois, la question du port d’armes à l’école reste une idée partagée dans la profession. Certains États proposent des formations pour le maniement d’armes aux enseignants, souvent très appréciés. « On ne sait jamais ce qu’il peut se passer. Je veux pouvoir me protéger, et protéger mes élèves », enseignante et participante dans le centre de formation Spanish Fork, dans l’Utah. Depuis 2019, plus de 300 instituteurs de l’Utah ont appris à se servir d’une arme.
Reflet d’une Amérique fracturé
Les Etats-Unis, marqué par une division idéologique, se retrouvent dans une impasse. Tandis que le président sortant, Joe Biden, qualifie cette fusillade de « choquante » et d’« insensée », Donald Trump, le président entrant, continue de prôner l’utilisation des armes à feu au nom de la sécurité.
Cette fracture idéologique représente le sentiment partagé des enseignants. Suite à la présidentielle américaine en novembre dernier, 50% d’entre eux ont voté pour Haris, parti démocrate, contre 39% pour Trump, parti conservateur, d’après les chiffres d’EdWeek Research Center survey. Les plus jeunes de la profession ont quant à eux eu plus un penchant pour le président arrivant.
Avant que Donald Trump ne prenne son poste dû à sa récente élection en novembre dernier, Joe Biden a exhorté le Congrès à agir pour voter des lois plus restrictives sur les armes à feu. Après la tentative d’assassinat du conservateur en juillet dernier, celui-ci ne démord pas son idéologie et compte bien renverser la balance.
Combinant une politique conservatrice ainsi qu’une nouvelle génération d’enseignants prônant l’armement de leur profession, les États-Unis continuent de s’enfoncer dans un climat de violence. Symbole inquiétant pour un avenir plus serein.
Elise BONTEMPS avec AFP
Décembre 2024